Bordeaux : le Musée de l’imprimerie s’efface et disperse sa collection de machines

Quarante-quatre ans pour amasser leur trésor : toutes les manières d’imprimer. Une semaine pour l’abandonner : toutes les raisons de déprimer. On a le cœur lourd et les bras chargés, ce mardi 5 mars, au Musée de l’imprimerie de Bordeaux. Presses à pédales, linotypes, pierres à lithographie… Tout doit disparaître. Jusqu’à vendredi, le musée liquide ses collections (plus de 150 machines) par camions entiers. « C’est une triste fin », commente Bernard Poitevin, membre du bureau de l’association gestionnaire du musée.

Plus de 150 machines sont entreposées dans l’ancienne brûlerie de café, dans le quartier Sainte-Croix.
Plus de 150 machines sont entreposées dans l’ancienne brûlerie de café, dans le quartier Sainte-Croix.

Gw. B.

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Quarante-quatre ans pour amasser leur trésor : toutes les manières d’imprimer. Une semaine pour l’abandonner : toutes les raisons de déprimer. On a le cœur lourd et les bras chargés, ce mardi 5 mars, au Musée de l’imprimerie de Bordeaux. Presses à pédales, linotypes, pierres à lithographie… Tout doit disparaître. Jusqu’à vendredi, le musée liquide ses collections (plus de 150 machines) par camions entiers. « C’est une triste fin », commente Bernard Poitevin, membre du bureau de l’association gestionnaire du musée.

Plus de 150 machines sont entreposées dans l’ancienne brûlerie de café, dans le quartier Sainte-Croix.
Plus de 150 machines sont entreposées dans l’ancienne brûlerie de café, dans le quartier Sainte-Croix.

Gw. B.

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Créé en 1980, celui-ci occupait depuis 1987 les 1 200 mètres carrés d’une ancienne brûlerie de café. Le local était mis à disposition par la municipalité. Sous les charpentes industrielles, une plaque garde la trace de l’inauguration de « La Maison des métiers de l’imprimerie » par Jacques Chaban-Delmas.

Bernard Poitevin avec une épreuve typographique représentant l’hôtel de Cheverus, siège de « Sud Ouest » de 1944 à 2009.
Bernard Poitevin avec une épreuve typographique représentant l’hôtel de Cheverus, siège de « Sud Ouest » de 1944 à 2009.

Gw. B.

Jusqu’au printemps dernier, l’endroit recevait ses visiteurs, scolaires, professionnels du design, au 10, rue Fort-Louis, dans le quartier Sainte-Croix. Entre les Beaux-Arts et l’Institut de journalisme, « un emplacement qui fait sens pour parler d’imprimerie », note Bernard Poitevin.

Aux XIX et XXe siècle, Bordeaux comptait de nombreuses imprimeries lithographiques. Les pierres conservées au musée gardent la trace de ces productions.
Aux XIX et XXe siècle, Bordeaux comptait de nombreuses imprimeries lithographiques. Les pierres conservées au musée gardent la trace de ces productions.

Gw. B.

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Au sein du collectif de passionnés (tous des anciens professionnels de la « chaîne graphique » : imprimeurs, métiers du papier…), on garde un goût amer de la fin de l’aventure, en mai 2023. « La Ville nous a fait savoir que nous devions déménager », rappelle Bernard Poitevin. La Ville souhaite en effet que le local revienne à l’école des Beaux-Arts.

La migration des machines

Déménager : la mission s’est avérée impossible pour ceux qui, en quarante ans, ont accumulé 900 tonnes de bois de fonte et de plomb. « Nous n’étions pas en capacité de nous acquitter d’un loyer et on ne nous a fait aucune proposition. Nous n’avons ressenti aucune volonté que le musée se perpétue d’une façon ou d’une autre », regrette Alain Berlureau, le trésorier.

Une linotype, machine de composition au plomb, dont l’invention en 1886 est indissociable de l’essor de la presse écrite. L’imprimerie de « Sud Ouest » rue de Cheverus en comptait une cinquantaine.
Une linotype, machine de composition au plomb, dont l’invention en 1886 est indissociable de l’essor de la presse écrite. L’imprimerie de « Sud Ouest » rue de Cheverus en comptait une cinquantaine.

Gw. B.

Alors, les membres de l’association, (anciens imprimeurs, papetiers, marchands de machine) se sont mis en quête de points de chute pour leurs collections. La plus grosse partie part dès cette semaine pour l’Atelier-musée de l’imprimerie (AMI) de Malesherbes, dans le Loiret.

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Un camion en partance pour l’Atelier-musée de l’imprimerie (AMI) de Malesherbes, dans le Loiret.
Un camion en partance pour l’Atelier-musée de l’imprimerie (AMI) de Malesherbes, dans le Loiret.

Gw. B.

Autres destinataires : les Jardins typographiques de Châteauroux, des ateliers typo à Bourges (18) et Romorantin (41)… « Notre plus ancienne machine, une Stanhope de 1820, ira dans un atelier de Pessac. » Un acheteur japonais est même passé par Bordeaux pour récupérer un jeu de caractères d’imprimerie occidentaux, introuvables au pays de soleil levant.

200 ans d’histoire

La collection avait de quoi intéresser un site de référence comme l’AMI : « Nous possédions des pièces représentatives de toutes les grandes avancées de l’histoire de l’imprimerie : l’invention du caractère mobile métallique réutilisable par Gutenberg en 1450 ; la lithographie qui, dès 1795-1800, a permis l’illustration rapide ; la linotype qui, à partir de 1886, a accompagné l’essor de la presse grâce à la composition au plomb… »

Un décor d’atelier clandestin réalisé à l’occasion du tournage d’un film sur la Résistance dans les locaux du musée.
Un décor d’atelier clandestin réalisé à l’occasion du tournage d’un film sur la Résistance dans les locaux du musée.

Gw. B.

Les gestionnaires du musée sont d’autant plus dépités qu’ils se faisaient fort de faire vivre leurs machines, dont bon nombre sont en état de marche, à l’occasion d’ateliers, y compris hors les murs : « Nous avons accueilli une centaine d’artistes, nous proposions des activités pour les scolaires, des animations lors de salons du livre… » Le musée a même servi de lieu de tournage pour des téléfilms, sur Balzac et la Résistance notamment : « Nous avons gardé le décor d’atelier clandestin qui avait été réalisé pour l’occasion », montre Bernard Poitevin.

Les collections du musée présentaient un fort ancrage local : 80 % de ses pièces proviennent de la région.
Les collections du musée présentaient un fort ancrage local : 80 % de ses pièces proviennent de la région.

Gw. B.

Un autre point qui « plombe » les gestionnaires du musée : le patrimoine préservé ici avait un fort ancrage local. « 80 % des machines ont été construites dans la région. Jusque dans les années 1950, il y avait encore une vingtaine d’imprimeries lithographiques à Bordeaux. Elles permettaient de créer des documents de facturation, des affiches comme celles de Toulouse-Lautrec. Les dernières lithos de Goya ont été réalisées à Bordeaux. Surtout, cette technique a permis le développement de l’étiquette des vins et spiritueux, donc d’identifier les bouteilles et de changer la façon de commercialiser les productions de Bordeaux et de Cognac. Nous possédions 1 000 pierres. »

Un pan d’histoire qui s’efface du paysage local. « Ce que nous craignons, confie Alain Berlureau, c’est que tout ce qui n’a pas trouvé preneur, nous soyons obligés de l’envoyer à la casse… »

Cette chronique est reproduite du mieux possible. Si vous désirez apporter des explications sur le sujet « Romorantin », vous avez la possibilité de d’échanger avec notre rédaction. Notre plateforme ville-romorantin.fr vous conseille de lire cet article autour du thème « Romorantin ». La fonction de ville-romorantin.fr est de rassembler sur le web des données sur le sujet de Romorantin et les diffuser en répondant du mieux possible aux interrogations des gens. En consultant régulièrement nos pages de blog vous serez au courant des prochaines publications.